Oser reconnaître que j’ai fait une erreur, au risque d’avoir à en payer le prix, en argent ou en réputation…
Ou oser affirmer que je vois la vie autrement que Monsieur ou Madame-tout-le-monde, au risque qu’on en rie, qu’on se méfie de moi,…
Ces deux audaces, en apparence opposées, nous amènent à la même adresse, soulèvent une question : dois-je accepter un prix à payer pour être moi-même? En même temps ils nous donnent sans doute une mesure de notre avancée sur le sentier de notre croissance intérieure. Comment donc ?…
→ Se tromper : une expression qui parle
Ma petite voix intérieure me donne déjà l’heure juste : je le ressens quand j’ai triché avec ma vérité. Reconnaître, et même dire «…je me suis trompé» est une marque d’intégrité qui me demande du courage par moments. Elle m’honore : je reconnais que j’ai fait erreur sur ma cible, que je suis un être d’évolution.
J’ai décidé pour moi d’amener ça plus loin, de le rattacher à une vision : celle où je me vois sur Terre dans un laboratoire de croissance, que j’ai choisi avant d’y atterrir. Les dés seraient pipés : j’allais perdre la mémoire de qui je suis au départ de cette exploration, et donc devoir forger ma trousse d’outils en avançant. C’était prévisible que je me trompe bien des fois sur les attitudes ou sur les gestes appropriés — surtout que j’allais faire l’expérience de chaque situation et de son contraire, pour être capable d’en tirer des conclusions.
C’était une conquête en perspective : par l’expérience arriver à me convaincre que le seul outil qui fonctionne est celui de l’amour, et qu’il ne peut éclore qu’en situation de vérité. La partie sera gagnée quand j’arriverai à croire que l’amour est mon unique nature, puisque c’est l’outil de la Vie dans sa création.
Alors, faut-il aujourd’hui me culpabiliser d’avoir encore quelques réflexes de survie? Le chercheur dans son labo devrait-il sortir son mouchoir pour pleurer sur des résultats décevants ? Il repart de ses hypothèses encore inadéquates, puis les raffine pour relancer l’expérimentation.
Se tromper… : quand j’y pense, le seul moment où me je trompe vraiment, c’est quand je détourne les yeux de ma vérité : c’est moi que je trahis.
Je deviens ce randonneur qui, se trouvant trop loin du but encore, refuse de reconnaître son point de départ : du coup il perd une info décisive qui lui permettrait de corriger sa trajectoire.
Ramenons ça à la dynamique que je vis alors : me sentant subtilement coupable, il y a des chances que je cherche un coupable en dehors de moi : un événement ou quelqu’un. Sur le coup je baisse mon niveau d’énergie; et si je fais de cette fuite une habitude, je diminue ma capacité de bonheur. À la racine, je me donne une preuve que je ne m’aime pas assez encore. Une construction sur du sable…
Retrouver l’être dont j’avais perdu la mémoire
Revenons au sens de mon expérience terrienne : comme elle s’est structurée en dualité à partir d’une vision que je serais coupé de la Source divine, comment pourrait-elle me parler de mon identité profonde? … Elle a tout pour me garder dans la peur, le sentiment du manque.
Si je viens d’ailleurs, la perspective peut changer : s’il est vrai que la Source ne sait créer que des chefs-d’œuvre, c’est que je suis plus grand que mon personnage temporaire.
Ma randonnée prend alors un autre sens : j’ai de quoi déjouer ma crainte de n’être pas assez. Mon enjeu n’est plus de faire valoir au mieux l’être un peu moche que je suis, ni même de m’améliorer, mais celui de forer plus creux pour retrouver le diamant que je cache, ce que je suis.
Je refuse de voir une calamité de la vie dans ce qui m’arrive, je décide d’en faire un tremplin d’évolution, et même de service à l’Humanité si j’ai soif d’aller jusque là. Devant quelqu’un qui pourrait me juger, me confronter ou me délaisser, je refuse de répondre par l’adaptation insécure. Plutôt, je me connecte au plus beau Robert, à la plus belle Johanne que je connaisse de moi — et qui transparaît quand je suis heureux — et j’entre dans le désir de faire cadeau de cet être à la personne qui saura en voir la beauté. Je viens au rendez-vous de réaliser l’être-que-je-suis.
Êtes-vous né-e à reculons ?
Si vous avez périodiquement ressenti un sentiment d’étrangeté face à ce monde, avec la soif d’y trouver des valeurs qui n’ont pas la cote aux alentours, bienvenue dans le club ! Beaucoup de gens vous ressemblent. C’est peut-être justement le signe que vous avez beaucoup à lui apporter…
Bien sûr, ça vous fait vous sentir vulnérable, par moments : vous ne savez pas très bien jouer le jeu, familial ou social. Peu à peu votre quête de sens vous met mal à l’aise avec les compromis. Ça vous demande du courage : pour accepter votre différence, accepter une certaine solitude …jusqu’à oser affirmer vos points de vue à l’entourage. La période d’épidémie récente vous y a fait goûter ?…
Une mutation inédite
Il semble bien que l’Humanité soit entrée dans une mutation comme elle n’en a jamais connu encore. Ça appelle des changements majeurs dans les valeurs et les priorités des gens au pouvoir comme de la masse des gens. Nos milieux vont prendre un certain temps à devenir réceptifs à de nouvelles perspectives sur la vie — à commencer par les êtres qui nous sont chers. C’est le long parcours de nous reconnaître comme les créateurs de notre expérience, personnelle, puis collective.
Pour entretenir son niveau d’énergie, sa joie de vivre, ça demande de s’en permettre, de s’en pardonner beaucoup, et de ne pas rester dans l’isolement. Bref d’entrer plus profond à l’intérieur, et là de reconnaître les nouvelles satisfactions qui font surface quand on se rapproche de soi.
Oui, si vous avez fait un bout de chemin à vous éveiller, considérez comme une hypothèse forte d’avoir choisi d’être de ces passeurs de lumière, comme les appelle Yves Duteil dans sa chanson mémorable.* Notre monde en a un urgent besoin.
Comment vous voyez-vous dans pareille perspective ?…
Denis Breton
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*L’article Partager ce qu’on a appris de la vie offre une occasion d’approfondir ce thème.