J’ai eu le bonheur de vivre la paternité sous plusieurs formes: par la procréation, aussi par l’adoption et l’accueil. Je remercie la Vie de cette expérience qui m’a fait grandir d’une façon insoupçonnée.
Tout particulièrement, je la remercie de m’avoir inspiré de devenir un père pour quelqu’un d’autre, alors qu’un père pleinement aimant m’avait beaucoup manqué.
J’ai pu ainsi guérir en moi l’image du père fissurée, celle du couple blessé, et appris à faire de ma vie une conquête, aussi bien dans ce qui m’a fait soif que dans ce qui m’a fait défaut.
J’en remercie la Vie, oui: la Fête des pères réveille en moi certaines fiertés, et c’est largement elles qui m’ont soutenu pour croire en l’avenir: le mien, celui de mes enfants.
…Et celles qui ont dû être mères et pères tout à la fois?…
Il me paraîtrait juste aujourd’hui d’élargir le sens de cette fête: je viens aussi saluer toutes les mères monoparentales qui ont dû se substituer à un père absent ou déficient.
Elles ont eu le rôle ingrat de donner de leur mieux à leurs enfants ce qui revient naturellement davantage au père: sécuriser, responsabiliser, pousser au dehors…
À leurs enfants, elles se sont données de leur mieux. Non seulement alors qu’elles n’avaient pas le réconfort d’une présence masculine à leur côté, mais souvent aussi après avoir manqué d’un père aimant au même âge.
Elles l’ont aussi fait en dépit de certains reproches de leurs enfants, qui dans leur blessure du cœur peuvent reprocher subtilement à leur mère l’absence ou la défaillance de leur père, ne l’ayant pas pour y diriger leur colère ou leur tristesse.
Et bon nombre ont fait ce don malgré l’ingratitude d’une société qui les condamne à un gagne-pain précaire, par la difficulté d’accéder à l’emploi aujourd’hui ou par la maigre prestation de retraite qu’elles appréhendent pour demain.
Une magie cachée de la vie?…
Si vous êtes de ces mères-courage, je vous invite à lever bien haut votre verre à votre propre santé, devant le miroir aujourd’hui.
Bien sûr parce que vos enfants et notre société vous doivent une fière chandelle.
Mais ça ne s’arrête pas là.
Il se peut que vous n’ayez longtemps vu qu’une mission périlleuse à réaliser.
En vérité, au niveau de votre propre croissance, vous avez probablement aidé la Vie à opérer une magie: vous vous êtes donné quelque chose du père ou du conjoint qui vous avait manqué.
«Donne-le pour le recevoir…» nous avait dit le sage de Galilée il y a 2000 ans. C’est tout le sens de ce qu’on a appelé la Règle d’or. On l’a prise pour une exhortation morale, elle serait en fait une loi qui régit le fonctionnement de la vie.
Alors?…
J’ai envie de vous dire: c’est ce que j’ai vécu comme père, c’est ce que vous avez vécu comme mères. Alors fêtons-le ensemble!
À tous et toutEs, bonne Fête des pMères aujourd’hui!
Denis Breton